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10 Janvier 2014
Parlement centrafricain au grand complet emmené sur ordre par avion à N'Djamena, président et Premier ministre convoqués sans ménagement: le chef de l'Etat tchadien Idriss Déby Itno a démontré jeudi sans état d'âme que sa réputation de "faiseur de roi" en Centrafrique n'était pas usurpée.
M. Déby est ulcéré depuis des mois par l'incapacité du président de transition Michel Djotodia, du gouvernement dirigé par le Premier ministre Nicolas Tiengaye et du Conseil national de transition (CNT, parlement provisoire) à mettre un terme aux exactions et à la spirale de violences interreligieuses.
Jeudi - à l'occasion d'un nouveau sommet régional sur la crise centrafricaine qu'il a convoqué en personne - il leur a clairement signifié, avec des mots abrupts, que tout cela devait cesser, alors que le sort du président Djotodia était toujours dans la balance dans la nuit de jeudi à vendredi où les tractations se poursuivaient dans la capitale tchadienne.
Pour le président tchadien, les violences dont ont été la cible en décembre ses compatriotes établis de très longue date chez le voisin centrafricain ont marqué un point de non retour.
Dès l'ouverture du sommet de la Communauté économique des Etats d'Afrique centrale (CEEAC) - qu'il préside -, il a directement mis en cause les responsables centrafricains.
"A ce jour, nous enregistrons des milliers de morts civils et militaires, y compris dans les rangs de la Misca (force africaine) et de Sangaris (opération française), plus d'un million de refugiés et deplacés centrafricains, plus de 18.000 rapatriés tchadiens et des centaines de rapatriés de diverses nationalités", a-t-il d'abord rappelé.
Devant MM. Djotodia et Tiengaye, il a ajouté: "Aujourd hui, un seul constat doit être fait, et il est amer. La RCA (république centrafricaine) subit au plus profond d'elle même les agissements de ses propres fils plongeant leur pays dans une guerre qui conpromet dangereusement son avenir et celui du peuple centrafricain".
"L'ordre et la sécurité"
Puissant voisin tutélaire de la Centrafrique - pays à l'histoire troublée depuis son indépendance de la France en 1960 -, le chef de l'Etat tchadien avait pourtant donné un feu vert plus que tacite au renversement du président François Bozizé le 24 mars par la coalition rebelle Séléka de Michel Djotodia.
Les troupes tchadiennes présentes autour de Bangui n'avaient pas bougé pour défendre le régime de M. Bozizé, parvenu au pouvoir dix ans plus tôt par un coup d'Etat, là encore avec l'appui de N'Djamena. Qui finira par le lâcher une décennie plus tard, le jugeant devenu incontrôlable.
Avec M. Djotodia, les relations se sont dégradées beaucoup plus vite. Sur fond d'ambiguïtés sur les liens du Tchad avec les rebelles de la Séléka, majoritairement musulmans et pour certains venus du Tchad, et coupables pendant des mois, en toute impunité, d'exactions contre la population très majoritairement chrétienne du pays.
Nombre d'habitants de Bangui ont dénoncé la collusion entre certains ex-rebelles et des soldats du contingent tchadien de la force africaine. M. Déby, soutenu en cela par l'Union africaine, a balayé ces accusations.
Et a rejeté en bloc la responsabilité de la crise actuelle sur les politiques centrafricains. "S'il y a eu échec, c'est celui de la classe politique dans son ensemble", a-t-il lancé aux membres du CNT.
"La transition n'a pas fonctionné comme on le veut. Les autorités qui ont la charge de mener cette transition n'ont pas pu répondre aux attentes des Centrafricains et de la communauté internationale, dont les plus importantes sont l'ordre et la sécurité", a-t-il accusé, tout en leur promettant que les "Etats de la CEEAC", dont le Tchad, "n'ont jamais eu la prétention de vous imposer des dirigeants, comme certains semblent vous le faire croire".