Projet de loi, relatif à l’amendement de la loi n 008/PR/2007
du 09 mai 2007 portant réglementation du droit de l’exercice
de grève dans les services publics
Réaction de Monsieur Djibrine Assali Hamdallah
Lors de sa réunion du conseil des ministres du jeudi 22 décembre 2016, le gouvernement a adopté un projet de loi relatif à l’amendement de loi n 008/PR/2007 portant réglementation du droit de l’exercice de grève dans les services publics.
Ce projet de loi qui sera certainement adopté par la procédure d’urgence par l’assemblée nationale, vient prouver, une fois de plus, que le régime d’Idris Deby Itno ne respecte pas ses engagements, ni la parole donnée ni aucun principe. Une dictature reste et restera toujours une dictature.
En effet, il convient de rappeler que les dispositions des articles 10 et 15 de cette loi que le gouvernement veut supprimer avaient adoptées de manière consensuelle par Conseil Supérieur de Transition (CST) qui comprenait dans ses rangs les représentants des syndicats ainsi que ceux d’autres associations de la société civile. Voici les dispositions de ces articles ainsi que celles adoptées par le conseil des ministres :
Article 10 (ancien) : "après épuisement des procédures de conciliation, lorsque le conflit persiste et à défaut d'autres voies de règlement éventuellement prévues après un accord ou convention des parties, les agents peuvent recourir à la grève.
Les salaires des journées non prestées sont à la charge des syndicatssauf si le motif de la grève est le retard généralisé de paiement des salaires ou imputable à l'Etat".
Article 10 (nouveau) :"Après épuisement des procédures de conciliation, lorsque le conflit persiste et à défaut d'autres voies de règlement éventuellement prévues après un accord ou convention des parties, les agents peuvent recourir à la grève dans les conditions fixées par la présente loi".
Article 15 (ancien) :"les journées de grève non prestées pour des raisons de grève ne donnent lieu à la rémunération sauf aux cas prévus au deuxième alinéa de l'article 10.
Article 15 (nouveau) : "Les journées de grève non prestées ne donnent pas lieu à la rémunération.
Les salaires des journées non prestées sont à la charge des syndicats initiateurs de mouvement de grève".
Comme on peut ainsi le constater, le gouvernement va se décharger de ses obligations de payer les salaires aux grévistes alors même que c’est sa défaillance qui les a obligés à entrer en grève. Car s’il avait effectivement payé les salaires à terme échu, la grève n’aurait pas eu lieu.
Evidemment, pour un régime qui n’avait pas hésité à faire modifier, en 2005 la constitution de 1996 afin de permettre au Président Idris Deby Itno de se présenter indéfiniment aux élections présidentielles, rien ne peut plus nous étonner.
Mais quand on sait que les manifestations sont systématiquement interdites, que la police a été massivement militarisée par le système de « reversement des officiers de l’armée dans la police » et que « les forces de l’ordre » n’hésitent pas à tirer à balles réelles sur ceux et qui celles qui oseraient manifester, on peut aisément comprendre que le gouvernement, par le bais de cet amendement, vient de briser le seul moyen de pression dont disposent encore les travailleurs contre lui.
Ce qui est surprenant, voire choquant, c’est de voir des cadres, des intellectuels, des dirigeants des partis politiques ou d’associations soutenir mordicus cette initiative liberticide oubliant qu’ils ont aussi des parents proches ou lointains, qui sont des fonctionnaires ou des agents de l’Etat. Qu’ils ont également des enfants, des petits frères ou de petites sœurs qui, un jour, le seront.
Une dictature ne sévit pas que contre les opprimés d’aujourd’hui