13 Novembre 2012
Ces Zaghawa qui nous gouvernent…
Il a fallu l’assassinat crapuleux de l’homme d’affaires soudanais pour que le président de la république en personne fasse la distinction entre les Zaghawa tchadiens et soudanais. Et cela, après que ces derniers nous aient envahis. Ils sont partout : dans la gendarmerie, à la police, l’armée et même la protection rapprochée du chef de l’État. Les plus fortunés auraient servi de couverture à ID, aux Erdimi et Daoussa Deby pour racketter à prix symbolique la Sner, l’hilerie, à créer l’Afcorp pour la construction du pont à double voie pompeusement appelé « Pont de l’unité ». Il est tellement difficile de distinguer les Zaghawas soudanais de ceux tchadiens qu’a vouloir démêler les ficelles qui les unissent, on y perd son latin !
Severin Georges Guetta
Ce qui distingue les Zaghawa des autres tchadiens, c’est le mépris qu’ils affichent pour ces derniers. Un Zaghawa n’aime pas le Tchad et les Tchadiens. Ce qui l’intéresse de notre pays, c’est l’argent. Il cherche les sous comme le ferait un juif. Au Soudan, on les appelle les juifs soudanais. Flairant d’instinct l’argent, les Zaghawa ont, après la défaite de Habré donc celle des Gorane, investi l’État et ses démembrements pour se faire des sous !
Les entreprises d’État, les projets, les régies financières de l’État sont pris d’assaut et passés sous leur contrôle. Quatre-vingt-dix (90%) des commandants de brigade sont ZaK. Ils constituent les 20% de l’armée et sont tous officiers. C’est l’ethnie qui comptent le plus de généraux. Aucun de leurs cadres n’est en chômage.
Es-tu en conflit avec un Zaghawa, tu ne trouveras personne pour trancher l’affaire dans le sens du droit. Magistrats, policiers, gendarmes, autorités administratives et même politique ont une peur bleue d’un Zaghawa. Ils sont solidaires qu’ils ne se font jamais du tort. L’effet du pouvoir aidant, le Zaghawa jouit de tous les droits et bénéficie de l’impunité la plus totale. Alors, on ne sait plus où donner de la tête !
Dans un crime comme celui du Soudanais, le chauffeur de l’assassiné lui a été prêté par le protocole d’État de la présidence ; les assassins sont de la GR de la présidence ; l’arme et la moto qui auraient servi à l’assassinat appartiennent à un ami du frère du président ; la femme de cet homme et l’épouse du président seraient des sœurs. Les autorités soudanaises réclament que la justice soudanaise juge ses citoyens. Mais tout ce beau monde, sur instructions de la présidence possède des papiers tchadiens : passeports et surtout diplomatiques, carte d’identité nationale. Beaucoup sont officiers de l’armée. Les instructions du chef de l’État sont si étendues qu’il y aurait des Zaghawa dans l’armée centrafricaine.
Eh oui le Tchad, après l’intervention armée qui a mis Bozizé au pouvoir, aurait demandé à ses ressortissants qui veulent rester en RCA d’intégrer l’armée centrafricaine. Ainsi, beaucoup de Zak sont devenus centrafricains. Comme les Banian mulengué, il n’y en a pas qu’en RCA.
Mais qui est Zagahawa et qui ne l’est pas depuis que certains Tamas, Arabes et Gorane se disent Zaghawa ? Grâce à cet apport de gens qui ne parlent en fait que la langue Zaghawa, les autres Tchadiens ont l’impression que les Zaghawa sont partout avec ce sentiment d’être pris en otages. Qui est donc Zaghawa ?
Etre Zaghawa, c’est d’abord une question d’appellation : Zaghawa, Bideyat, Borogat, Touer, ce sont les mêmes personnes.
Lorsqu’ils sont au Soudan, on les appelle Touer, mais au Tchad, leurs voisins Ouaddaïens, Tawa, Mimi désignent par Zaghawa ceux qui sont dans le Biltine. Les Goranes appellent Bideyat ceux qui sont dans l’Ennedi. Mais les Borogate sont les Zaghawa qui se sont goranisés à telle enseigne qu’ils parlent les deux langues : gorane et zaghawa.
Mais les Zaghawa se désignent entre eux, tous sous-clans confondus, Béri et la langue qu’ils parlent est désignée Beria. Si ceux de Biltine sont définitivement appelés Zaghawa, ce sont les autres sous-groupes qui sont un véritable casse-tête chinois pour celui qui n’est pas des leurs.
Ils sont, en effet, dispersés et disséminés dans des petits sous-clans. Mais pour simplifier les choses, il faut aussi comprendre que les autres sont les Zaghawa de l’Ennedi. Après tout, ce n’est qu’une question d’occuper un peu de montagne ou une vallée !
Les Zaghawa de l’Ennedi sont les Bilieda, c’est-à-dire les habitants de la région de Bilia. Ils sont de deux sortes : les Biliedia autochtones ou anciennement installés dans la région de Bilia. Ils se repartissent en six (6) sous-clans : les Koliyala (le sous-clan du président ID), les Ouralla (d’où sont issus les Erdimi), les Gueniguerkala, les Chekalla, les Erdeballa (des Zaghawa Goranes d’origine comme Kerim Nassour ou Dali Hassan) et les Makka. Quant aux Bilieda allogènes ou arrivés après les premiers dans la région de Bilia, il y a aussi six (6) sous-clans : les Kozara, les Erdiya (d’origine Dazo du Kanem ou Bouchiya), les Mahamiya (d’où est issu Youssouf Togoïmi). Eh oui, les parents de Togoïmi sont des Zaghawa qui ont émigré du Tibesti et se sont installé en milieu Zaghawa. Ces premières complications sont aussi à l’origine du deuxième groupe d’appellation Borogate. Ce sont des Zaghawa qui se goranisés ou des Goranes qui se zaghawisés.
Il y a aussi deux sous-groupes : les Borogate anciennement installés et les autres arrivés après. Parmi les premiers, on dénombre les sous-clans suivants : les Erchida, les Dougoulla (d’où est issu Djimet Togou), les Toula, les Kouan, les Obaïda (d’où est originaire Adoum Diar), les Hadada (d’où est issu Allatchi Galma), les Owila, les Sara (d’où est originaire Soumaïne Hassane, généralement appelé « blindé ») et les Kamara (sous-clan de Souleymane Karda).
Le deuxième sous-groupe est composé des sous-clans suivants : les Gourkoulla (qui sont des Anakaga bidessa d’origine). Ce sont des Anakaza de Faya qui sont venus s’installer dans le milieu Zaghawa. De ce sous-clan appartiennent Mahamat Saleh Brahim (l’homme fort de la garde nomade) et Adoum Togoï (le général rebelle). Les Bicheïda (d’où est issu Issa Balil) sont arabes d’origine. Alors que les Gaéla d’où sont issus Béchir Moussa (l’ancien CEMGA décédé à Paris) et Djourouba Djaga (qui fut aussi CEMGA) sont Téda d’origine comme les Ourda d’Abakar Tolly ou Borchiya du Kanem. Ainsi que les Borboriya qui sont Gaéda (Goranes originaires du Kanem comme certains Kanembous). Tandis que les Tchioda sont Téda d’origine et les Tomolla sont arabes d’origine. Le général Yosko Hassani appartient à ce sous-clan. Enfin, les Gaouda, ce sont les Zaghawa goranisés plus à l’Est de l’Ennedi.
Ceux qui ont pu mémoriser tous les noms se souviendront qu’en dehors des Zaghawa de Biltine (Kobé et autres) qui dépendaient du Sultanat de Haggar, il y a une trentaine de sous-clans Zaghawa dans l’Ennedi. Le fait que le pouvoir et la solidarité d’intérêt lient certes ID, les Erdimi, Kerim Nassour, Djimet Togou, Adoum Diar, Allatchi Galma, Soumaïne Hassane, Mahamat Saleh Brahim, Issa Balil, Béchir Moussa pour ne citer que ceux-ci, mais chacun appartient à un sous-clan précis. Les mariages et autres alliances sont venus compliquer les relations mais dans ces clans nomades, on éclate vite pour s’allier demain lorsque les intérêts l’exigent. Tout le monde est Zaghawa, mais il y a Zaghawa et Zaghawa. Youssouf Togoïmi en étant Zaghawa d’origine a bien combattu le pouvoir Zaghawa jusqu’au sacrifice de sa vie. Ceux des intellectuels qui entourent ID dans la bêtise et la méchanceté l’ont fait par choix et intérêt politiques. Nous ne devons pas être dupes.
Le Temps No 362 du 8 au 14 octobre 2003
NDLR: la rédaction du blog a réactualisé cet article toujours parlant.