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27 Mai 2011
Regards d'Africains de France
Que peuvent faire les Tchadiens pour se débarasser de leur régime actuel, un
des sanguinaires et plus faux de notre temps, qui fait vivre à son peuple une des périodes les dures de son histoire? Après plus de vingt ans de pouvoir, le
président tchadien et tous ceux qui gèrent le pays avec lui ne vivent que pour eux-mêmes, pendant que la mortalité des tchadiens due à la faim, aux maladies ou à la
répression ne cesse d'augmenter. Mais comment amener la population tchadienne à prendre en main son propre destin, par des actions concrètes contre le pouvoir ? L’article du
journaliste Badylon Kawanda Bakiman de Kikwit, en République Démocratique du Congo, par le biais de Syfia-Grands lacs, nous démontre comment, par des actions concrètes, un peuple ou un
groupe peut fléchir un gouvernement, quel que soit son pouvoir et sa force de résistance.
(Syfia Grands Lacs/ RD Congo) Les jeunes de la ville de Kikwit, au sud-ouest de la RDC, sont très peu nombreux à se faire enrôler s'estimant trahis par les élus qui ne vivent que pour eux-mêmes pendant que leur ville se meurt. La CENI, les hommes politiques et la société civile tentent de les convaincre de s'inscrire…Dimanche 22 mai, 9 h30. La cour du centre d’inscription 13810, dans la commune de Nzinda est quasi vide. Seuls quelques policiers commis à la sécurité des kits électoraux et des lieux sont présents. Dans la salle, huit personnes dont cinq femmes attendent d’être enrôlés devant l’unique ordinateur encore opérationnel. Près de deux mois après son lancement, l’enrôlement des électeurs marque le pas à Kikwit, principale ville de Bandundu, 470 km à l’est de Kinshasa. Les électeurs, surtout les jeunes, ne se bousculent pas. "Nous avions bien commencé au mois d'avril. Mais ces derniers temps nous constatons que la population se fait désirer. A ce jour, nous avons enrôlé un peu plus de 3000 personnes dont 23 % de jeunes et 77 %de vieux", explique la présidente du centre d’inscription, Marie Makila. Même constat dans les autres centres d’inscription où les jeunes sont ceux qui s’enrôlent le moins. Au centre d’inscription de Lukemi, sur près de 6000 électeurs déjà inscrits, les jeunes représentent 14 %, loin derrière les femmes 69 %, les plus nombreuses à s’enrôler.
"Que font les élus ?"
Pour Mbuta Kekula, un jeune homme de 19 ans, "depuis que les gens ont voté en 2006, rien n'a changé. Les élus roulent carrosses, ils s'enrichissent et la population demeure toujours pauvre. Je n'ai pas besoin de vos cartes-là", fulmine-t-il. Plus amère, Hélène Musongila, une habitante de Kikwit ne trouve pas de raison d’aller chercher sa carte d’électeur : "Kikwit est entouré de ravins, le problème d'eau et d'électricité n'a jamais été résolu, la population vit dans une misère noire...Personne ne songe à améliorer notre sort. Qu'est-ce que je vais faire au centre d'inscription ou au bureau de vote? On nous distrait", tranche-t-elle. Devant ce tableau peu reluisant, une autre habitante de la ville s’interroge juste : " Que font les élus ?"Pour convaincre les jeunes, encore réticents, le chef d’antenne de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Norbert Okung, a réuni le 13 mai les responsables des associations de jeunes de la ville. "Je leur ai demandé de sensibiliser et de convaincre leurs amis jeunes pour qu'ils s'enrôlent massivement. Il y a quelques jours, un jeune dans la commune de Nzinda, avait déchiré une carte d'électeur. C'est grave!", leur avait-t-il dit. Le résultat à un mois de la clôture des opérations est catastrophique. Seulement quelque 150 000 personnes sur une population estimée à un million d’habitants ont été enrôlées.
Un devoir civique
Des organisations de la société civile et même les politiciens de la place mettent la main à la pâte en animant des émissions radio et en organisant des conférences. Dans des partis politiques ou même dans certaines églises de Kikwit, des messages sont lancés et répétés. "Nous leur disons que s’enrôler est un devoir civique. Nous voulons que Kikwit ait plus de députés qu'en 2006", explique Pierre Munkutu, un des cadres de l'UPNAC (Union de patriotes nationalistes congolais).Jacques Mabelakoto, 20 ans, est de ces jeunes qui se sont ravisés : "Je demande à mes amis jeunes de venir nombreux se faire enrôler. J’avais suivi à la radio, le chef d'antenne de la CENI/Kikwit qui a dit que cette carte d'électeur est une carte d'identité".