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27 Février 2010
Alliance Nationale pour
la Démocratie et le
Développement (AND)
MOT D’ENCOURAGEMENT ET D’ORIENTATION A L’OCCASION DE L’INSTALLATION DES COORDINATIONS DE LA VILLE DE N’DJAMENA.
N’Djamena, le 27 février 2010
Par Salibou GARBA, Président National.
Messieurs les Présidents et Secrétaires Généraux des partis amis,
Camarades militantes et militants,
Sympathisantes et sympathisants,
Cher(e)s Ami(e)s, Cher(e)s Invité(e)s,
Mesdames, Messieurs,
Nous avons voulu cette cérémonie courant janvier pour ainsi entamer la nouvelle année. Mais voilà, nous sommes à la fin février. Qu’à cela ne tienne !cela ne nous interdit pas d’exhorter les uns et les autres à faire en sorte que l’année 2010 enregistre des avancées significatives dans la recherche de la paix et de la construction de notre démocratie balbutiante ; qu ' elle soit une année de rupture d’avec les affres des années précédentes.
En effet, depuis plusieurs années, le Tchad vit une période de fortes et éprouvantes turbulences, avec leurs paroxysmes en 2008 ; 2008 qui aura été très rude et très pénible pour les Tchadiens dans leur ensemble.
Nous ne saurions ainsi oublier les tirs d’obus par terre et par air qui se sont abattus sur les N’Djamenois. Pouvons-nous assurément dire que ces épisodes douloureux relèvent d’un passé révolu ? Rien n’est moins sûr. La nième réconciliation entre les Présidents soudanais et tchadien à elle seule ne saurait dissiper nos inquiétudes et interrogations. Qui et qu’est-ce qui ont poussé ces frères ennemis à se rendre visite et à s’entendre sans médiateur apparent, après les nombreux échecs essuyés par plus d’un Chef d’Etat ? Quelle va être la solution à trouver entre le pouvoir tchadien et ses rebellions ? Y’aura-il un autre accord, en dehors des mécanismes de mise en œuvre de l’Accord de Syrte ? Mieux, comment vont cohabiter tous ces chefs de guerre qui se connaissent trop bien, qui se vouent des inimitiés profondes après des décennies de confidences ?
Les leaders d’opinions, journalistes, animateurs de la société civile et responsables de partis politiques ont connu ces dernières années une vague répressive sans précédent. Notre ami, frère et compagnon Ibni est jusqu’aujourd’hui introuvable, enlevé par l’armée gouvernementale. Et si le Président Lol Mahamat Choua et le Fédéraliste Yorongar sont encore parmi nous, cela relève du miracle ; c’est pour ainsi dire de la volonté divine.
Les agents des médias exercent leur profession avec la peur au ventre, contraints à l’autocensure, car pouvant à tout moment être la cible des colères du pouvoir : tabassages, intimidations, enlèvements et arrestations, c’est le lot à subir.
Sur le plan social, comment qualifier ces déguerpissements sauvages et cette avalanche de mesures déconcertantes des maires de nos villes : ordre de démolir les constructions en matériaux ordinaires, interdiction des taxis-motos, interdiction de l’usage du charbon de bois, interdiction de ceci, interdiction de cela, obligation de faire ceci, obligation de faire cela, toujours de façon abrupte et sans mesure d’accompagnement?
Nous pouvons nous étendre longtemps sur cette énumération peu réjouissante. Tout le monde en convient, les Tchadiens sont mal à l’aise, très mal à l’aise. Ils sont angoissés, désemparés, ne sachant pas de quoi demain sera fait, ne sachant à quels saints se vouer.
La récente grève largement suivie du corps enseignant est-elle annonciatrice de mouvements sociaux plus étendus ?
Mesdames, Messieurs,
Militantes et Militants,
C’est parce que vous voyiez venir cette situation chaotique que vous avez instruit le Bureau du parti, dès 2002, d’œuvrer à la recherche du rassemblement des forces de l’opposition.
Sans relâche et avec détermination, la direction du parti s’est attelée à des discussions avec bon nombre de partis politiques.
C’est ainsi que nous avons contribué à l’élaboration du « Mémorandum en vue de l’amélioration de l’organisation des élections au Tchad » signé par plus de 30 partis issus de tous les courants politiques, le 27 septembre 2003.
Puis, vous avez soutenu les efforts ayant permis la création de la Coordination des Partis politiques pour la Défense de la Constitution (CPDC), coalition qui a porté les espoirs de ceux qui aspirent à l’approfondissement de la démocratie, à l’amélioration des conditions de vie et de travail, par le biais de la restauration de l’Etat et la lutte contre la pauvreté.
Mesdames, Messieurs,
Une nouvelle page de l’histoire politique de notre pays s’est ouverte avec la signature de l’Accord politique du 13 août 2007.
Malheureusement, nombreux sont ceux qui, au sein du pouvoir, ne cessent de montrer qu’ils n’acceptent pas d’honorer les signatures qui les engagent pourtant.
Tout est mis en œuvre pour ne pas appliquer cet Accord. La mise en place de la CENI et de certains de ses démembrements, ainsi que la campagne de popularisation de l’Accord en cours ne doivent pas faire illusion. D’autant plus que vous avez tous suivi les tiraillements qui les ont accompagnées.
Vous suivez également la marginalisation délibérée du Comité de Suivi et d’Appui dans le suivi des opérations de terrain : recensement démographique, mise en place des démembrements de la CENI, etc. pendant que des fonds sont grassement alloués exclusivement aux partis de la mouvance présidentielle pour assiéger les délégués de la CENI, aux fins de semer la confusion et faire obstruction à la lisibilité du processus. D’où les difficultés de la CENI à être opérationnelle sur le terrain, dans les délais.
Ce qui ne manque pas de susciter, voire de confirmer, les inquiétudes et le scepticisme des populations sur la façon dont les prochaines élections vont être organisées.
En réalité, les faucons n’entendent pas se départir de la logique du parti unique, de la logique du MPS parti-Etat, avec la forte implication des chefs de circonscriptions administratives et des autorités coutumières et traditionnelles dans les activités politiques partisanes, plus particulièrement dans le processus électoral en cours.
Ne nous laissons pas berner, le timide lancement du processus de mise en œuvre les résolutions des états généraux de la Justice à travers le PRAJUST (Programme d’Appui à la Justice) et celui annoncé des forces de sécurité intérieure sont surtout le fait de la perspicacité de la communauté internationale, et ne permettent pas de croire que l’environnement général sera assaini.
A l’AND, nous disons avec force qu’il n’y a pas de salut en dehors de l’application de tous les accords dans une synergie efficiente. Nous ne pouvons pas croire que le renforcement du processus démocratique puisse aller de pair avec la guerre, les menaces, les intimidations et les restrictions des libertés.
Le gouvernement, en tant que chargé de la conduite des affaires de l’Etat, est le premier responsable de la persistance de la guerre, de la persistance de la déliquescence des structures de l’Etat. Le sursaut patriotique dont le pays a besoin doit venir du Président de la République et du Gouvernement. La responsabilité est d’abord à ce niveau, et non ailleurs.
Interviendra par la suite celle des autres acteurs politiques, de l’opposition et plus particulièrement de la CPDC.
Mais peut-on honnêtement et raisonnablement dire aujourd’hui que la CPDC est en mesure de relever le chalenge ? La réponse est des plus incertaines.
La CPDC a certes joué un rôle éminemment positif pour d’une part convaincre la communauté internationale que la gestion des affaires publiques par le MPS et ses alliés est à l’origine des convulsions qui secouent notre pays, et d’autre part pour contraindre le pouvoir à de véritables discussions, avec au moins la classe politique de l’intérieur. La signature de l’Accord politique du 13 août 2007 en est l’actif le plus significatif.
Mais depuis, le doute s’est emparé des militants et de l’ensemble de la population. Pouvait-il en être autrement dès lors que notre coalition a été constituée sur fond de non-dits, par des leaders aux soubassements politico-idéologiques divers ?
Les évènements de février 2008, la cooptation de certains membres par l’Exécutif et la mise en place de la CENI et de ses démembrements ont fortement ébranlé la cohésion en son sein. La gestion de l’affirmation de la double appartenance à l’opposition et à l’Exécutif se révèle franchement acrobatique.
On peut espérer que la CPDC puisse encore demeurer un cadre informel de concertation de ses membres dans la gestion de l’Accord politique du 13 août 2007. Le reste, c’est-à-dire parler de listes communes pour les législatives et de candidat unique pour la présidentielle, sera, à l’évidence très laborieux.
Faisant la part entre nos souhaits, entre les souhaits de la population et la réalité objective, nous ne pourrions que prendre acte des différences d’approches liées certainement à des différences d’intérêts. Ce qui annonce d’ores et déjà une recomposition du paysage politique.
Chers ami (e)s et compagnons, c’est à cette nouvelle perspective que je vous convie à réfléchir, à concevoir et à agir.
Il est encourageant de relever que les militants de notre parti ont entrepris un important travail de restructuration et d’élargissement de nos organes de base.
L’installation de quelques Comités d’Arrondissement pour la Ville de N’Djamena n’est qu’un cas parmi tant d’autres.
Il s’en suivra des manifestations similaires, tant à N’Djamena que dans d’autres localités du pays, comme vient de le relever la Secrétaire Exécutive Nationale.
Ce travail de restructuration doit aller de pair avec la formulation d’un programme politique offrant davantage de lisibilité dans ce que nous souhaiterions accomplir, avec d’autres tchadiens, afin de bâtir le renouveau démocratique et jeter les bases du progrès socio-économique. Les axes fondamentaux d’un tel programme sont de notre point de vue:
1- la recherche résolue de la paix par un dialogue constructif avec toutes les oppositions, ainsi que le respect des engagements et accords ;
2- l’approfondissement de la liberté d’expression, avec la cessation des entraves à l’exercice du métier de journaliste ; la dépénalisation du délit de
presse est pour nous un objectif cardinal ;
3- l’implication des citoyens dans la gestion de la chose publique qui passe par une réelle décentralisation des pouvoirs à travers la mise en place de toutes les collectivités territoriales prévues depuis 1996 par la Constitution d’une part, et par la mise en œuvre des mécanismes des véritables concertations des forces vives pour toute mesure à caractère social ou économique d’autre part;
4- l’acceptation de la démocratie dans toute sa plénitude avec une réelle possibilité d’alternance au pouvoir par la voie des urnes; ce qui implique le maintien, pendant encore plusieurs années, du cap dans la mise en œuvre des dispositions de l’Accord politique du 13 août 2007 ;
5- la restauration de l’Etat, dans toutes ses dimensions, en proie à un délitement sans précédent ;
6- l’assainissement de la situation économique et de la gestion des finances publiques, ainsi que la réponse adéquate à la très forte demande sociale, par la lutte contre la gabegie, la corruption et les détournements des deniers publics ; lutte qui ne doit pas être des opérations en trompe-l’œil sur fond de règlements de comptes, mais une lutte sous-tendue par une Justice équitable et indépendante, pour endiguer la banalisation de l’impunité et autres passe-droits.
L’AND convie, l’ensemble des formations politiques qui croient en la possibilité de construire un Tchad de paix et de progrès, à approfondir les débats autour de ces axes afin de dégager le programme de la « Nouvelle Espérance » tant attendu.
Il faut y aller vite car l’année 2010 et la suivante sont des années électorales et nous devons offrir des choix clairs à nos concitoyens.
En tout état de cause, à l’AND vous devez, d’ici le mois de mai 2010, être fixés non seulement sur ce que vous pouvez faire et ferez pendant les élections qui sont au programme, mais aussi avec qui vous allez le faire.
Je
vous remercie
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