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1 Juillet 2011
UNIVERSITE DE NDJAMENA, TEMPLE DU SAVOIR OU DE DESESPOIR ?
DINGAMTOLOUM Tobrome,
Etudiant en 6ème année de Médecine,
exclu de l’Université de N’Djamena et contraint de
quitter sa patrie pour avoir réclamé un peu de considération
et de justice pour la jeunesse Tchadienne !!!!
J’ai ouïe dire que, le 31 Mars 2011, IDI a, une fois de plus, usé de son art de mettre de la poudre aux yeux de la jeunesse tchadienne en organisant une grande cérémonie festive pour soit disant commémorer l’inauguration de l’université de Toukra jusque là inachevée. Prenant toujours sa jeunesse pour un amas d’imbéciles, Mr Deby a offert aux étudiants quelques bus pour leur faire croire qu’il allège leur indescriptible souffrance. Or un petit tour dans les universités de Bamako, de Dakar, de Lomé, d’Abidjan ou même de Ouagadougou nous confirmera que nous sommes la génération sacrifiée.
Nous avons toujours espéré qu’avec nos revenus pétroliers nous sortirons de notre misère chronique. Cependant la situation ne fait que s’empirer.
Des voix s’élèvent parfois pour aider à redresser cette situation mais personne n’y prête une oreille attentive.
Que ce soit ceux qui se disent nos formateurs, que ce soit notre ministère de tutelle, que ce soit le chef de l’Etat lui-même, personne ne se soucie de l’amélioration de nos conditions d’étude.
Et ceci, pas par ce qu’ils ne le savent pas, mais peut être parce qu’ils pensent que bien former la jeunesse ne leur permettra pas de bien piller le pays comme ils le souhaitent et le font. Si non, où sont passées les conclusions des états généraux de l’enseignement supérieur tenus à N’Djamena en 2008 ?
Les étudiants ne cessent, durant ces deux dernières décennies, d’exprimer haut et fort leurs multiples jérémiades à leur papa, le chef de l’Etat, qui leur affiche toujours une indifférence totale. Mon frère Serge OUAMBI, ancien Secrétaire Général de l’Union Nationale des Etudiants Tchadiens dirait à IDI, je cite: «… les étudiants tchadiens ont cogné, à se rompre les doigts de la main, à vos portes au sujet de leurs revendications sociales portant essentiellement sur l’amélioration de leurs conditions d’étude et de vie….»
En 2009 à la faculté de médecine de N’Djamena, alors que j’étais le président de l’Association des étudiants en Médecine, avec le soutien de mes amis d’université qui pensent comme moi qu’il faut toujours espérer et se battre pour revaloriser notre temple du savoir, j’essayais de dénoncer le grand désordre orchestré consciencieusement par nos responsables. Malheureusement, à chaque fois, le constat était le même : au pays de Deby on n’a pas besoin des élites, on n’a pas besoin de têtes bien pleines.
Je garde toujours amèrement en mémoire ce mois de mars 2009 où une grève s’était imposée à nous. Grève dont la gestion illustre bien la méchanceté, l’injustice, la corruption et le manque de patriotisme qui animent nos dirigeants.
En rappel, durant cette crise, j’ai essayé de relever quelques dysfonctionnements dans ma faculté. J’ai fait parvenir cela au chef de l’Etat sous le « mémorandum des étudiants en médecine » et sous forme d’une « lettre ouverte au chef de l’Etat », le 10 Avril 2009. Dommage, mes enseignants d’abord, le ministère de tutelle ensuite et le chef de l’Etat enfin ont pensé que je constituais une menace pour leurs intérêts personnels et ont décidé de m’expulser de l’université avec un bon nombre de mes collègues de 6ème année, mes ainés de 7ème année et quelques cadets qui épousaient notre esprit de lutte.
Dr Ngombaye Djaibé, un de nos enseignants, à l’époque Ministre de la Santé Publique, très zélé pour nous signifier le mépris de Deby face à la jeunesse, nous a déclaré lors d’une rencontre au rectorat, que nous n’avons aucun droit à réclamer. Nous n’avons plutôt qu’un devoir, celui de les vénérer et qu’ils étaient prêts à s’en passer de toute notre génération. Ridicule ! Des dieux à la faculté des Sciences de santé de N’Djaména !!! Alors qu’à ce sujet, l’avertissement du Tout Puissant est formel dans Exode 20 : 3-5 « Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face. Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point; car moi, l'Éternel, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis l'iniquité des pères sur les enfants jusqu'à la troisième et la quatrième génération de ceux qui me haïssent ».
L’ordre des médecins auquel nous nous étions confiés nous a notifié, à son tour, qu’en médecine même si l’ainé détruit ton avenir, tu ne dois pas te plaindre. Tu dois le vénérer au contraire. Ces syndicalistes nous instruisent de reconnaitre que c’est un grand péché que de revendiquer son droit. Le président de cet organe, à l’époque Dr TETIMIAN, va plus loin nous proposer de demander une grâce présidentielle au chef de l’Etat, comme si nous étions juridiquement condamnés.
Nous avons saisi malgré tout l’instance juridique indiquée, la cour suprême, pour la circonstance. Malheureusement au Tchad le droit ne se dit pas. Le rôle de ces magistrats n’est rien d’autre que de protéger les intérêts de leurs amis ou de leurs frères de la même loge. Je reviendrai très prochainement sur le mysticisme qui a entouré ce pseudo procès qu’ont géré Mr SOUROUMBAYE, juge à ladite cour, et ses collègues.
Ceci étant, parmi les multiples freins à la bonne formation de la jeunesse, le profil même de nos enseignants fait croire que notre université ne possède même pas le centième de ce qui fera de lui le panthéon du savoir. Triste rappel, nous n’avons qu’un seul professeur à la faculté de médecine. Prof Avocksouma, un économiste. Nous n’avons aucun médecin agrégé. Nous n’avons que pour enseignants quelques cliniciens spécialisés et quelques généralistes qui ignorent totalement la pédagogie sinon l’orthodoxie médicale. Beaucoup de ces enseignants permanents n’exercent pas leur fonction par vocation mais par contrainte on dirait. Nos facultés sont truffées d’enseignants aigris, tarés qui ne produisent aucun document, donc ne justifient pas leur colossal frais de recherche. Ils n’arrivent même pas à publier un petit article d’une page bien qu’ils soient là depuis 8 ou 10 ans. Rares sont ceux qui sont capables de dispenser les cours dans le temps imparti. Il est bien triste, mais il ya aussi des enseignants que nous venons chercher des débits de boisson pour amener nous donner cours, et, à la fin de l’heure, nous les ramenons au bar où nous les avons cherchés. Ils ne sont pas à mesure de mettre à la disposition des étudiants les objectifs de stages. Il est aussi de coutume que dans notre faculté la date des examens est fixée au bon goût des enseignants qui n’aspirent qu’à nuire, au maximum, à ces jeunes. Et étant conscients qu’ils maintiennent leurs étudiants dans l’injustice, ils nous refusent d’accéder à nos copies corrigées pour d’éventuelles réclamations. Les autorités décanales sont incapables d’élaborer ne serait ce qu’un calendrier académique. Bref, nous avons pour enseignants un club d’amis qui développent un zèle extraordinaire lorsqu’il s’agit de brimer un étudiant parce qu’il pose des questions pertinentes ou pour exclure des étudiants en médecine parce qu’ils revendiquent leur droit. On nous dira que ce sont les mauvaises graines, mais entre nous soyons conséquents, après avoir investi des sommes colossales pour leur formation, l’Etat tchadien qui manque déjà cruellement de médecins perd quant même quelque chose. Dans quelle université du monde on ne revendique pas ? Si vous en trouvez une où on ne revendique pas, c’est que les conditions d’étude y sont réunies ou il n’ya que des cancres qui y étudient.
Les responsables politiques sont, quant à eux, très satisfaits d’avoir sous leur responsabilité ces gens de mauvaise foi qui les aident à traduire dans les faits leur but qui est de priver le Tchad d’une ressource humaine bien qualifiée.
Les actuels responsables de l’enseignement supérieur, l’ingénieur Maloum Sultan, recteur de l’université de Ndjamena et son chef Ahmat Taboy doctorant à l’université de Ouagadougou, en même temps Ministre de l’Enseignement Supérieur, sont de véritables machines destructrices pour l’avenir des jeunes Tchadiens. Ce sont des véritables virus très virulents répandus sur notre chemin de recherche d’un avenir meilleur.
Il n’ya qu’au Tchad que nous ne disposons pas d’une bibliothèque ni d’un laboratoire digne de nom en ce 21ème siècle où notre or noir nous rapporte des milliards par mois. Et que les fonds alloués à la génération future sont dit-on gelés à notre profit. Quel paradoxe !
IDI aurait mieux fait de regarder la vérité en face, au lieu de chercher à la cacher avec la paume de sa main. Il est vrai qu’à Toukra l’intension est de construire une université digne de nom. Mais en ce qui concerne les bus si les frais d’entretien ou d’achat sont engloutis par les responsables en charge, cela donnera toujours lieu à d’interminables années universitaires élastiques, et des étudiants renvoyés encore et encore. Je dis ceci en connaissance de cause. Nos responsables sont des excellents criminels économiques. Un petit audit sur la gestion de Dr DJADA DJIBRINE ATIM, doyen de la faculté de médecine que je qualifie de doyen des menteurs et de pilleurs de biens publics, attestera ce que je dis. Je reviendrai aussi plus tard sur comment ce Mr qui se dit chrétien met en ruine la faculté dont il a la charge.
Au chef de l’Etat IDI, c’est une grande honte de se réclamer le serviteur des étudiants au vu de tout cela. Qu’il me soit permis de vous notifier que durant vos vingt ans à la tête de la magistrature suprême, vous n’avez absolument rien apporté aux étudiants. Même pas une aiguille. Vous avez plutôt détruit le peu de ce qui faisait l’honneur de la jeunesse tchadienne sous les régimes ayant précédé le vôtre. Autrefois, les Tchadiens qui partaient étudier à l’extérieur excellaient. Aujourd’hui un petit tour dans les instituts tels que l’IAM de Ouagadougou, les grandes écoles telles que l’ENAM, l’ENAREF vous mettra à l’évidence que vos multiples enfants à l’étranger sont les plus médiocres. Notre université est infestée, la corruption s’y est installée. Il faut que la sélection des professeurs se fasse dans les règles. Contrairement à ce que pensent certains Tchadiens, le Tchad dispose d’assez de compétences pour la mise sur pied d’une université digne de nom. Beaucoup de Tchadiens de l’extérieur n’attendent que des garantis sécuritaires (alimentaires, social etc.) pour aller aider leur petits frères. Les enseignants qui sont actuellement là sont incapables d’apporter des reformes. Qu’ils aillent bomber leur poitrine ailleurs que de continuer à tuer l’avenir de notre patrie. Une université digne de ce nom, je suis content, mais vos enfants viendront étudier à Toukra ? Au Tchad le paradoxe c’est qu’on ne croit même pas à ce qu’on fait.
On n’a pas de considération pour nous qui avons étudié au Tchad. Il n’ya aucune politique pour favoriser notre insertion sociale. Quand on se dit premier des Tchadiens on doit se dire qu’on est le père de tous ces jeunes. Et qu’on a l’obligation de leur garantir une formation de qualité, un avenir radieux !
Monsieur le Président vous nous avez habitués à des folklores tels que je ne crois plus à votre geste de bonne volonté. Vingt et un ans c’est trop. Ce n’est pas à cette époque que vous allez bien changer. Wait and see !!
Je dirais qu’au Tchad l’université a besoin d’être reformée au détail près. Il nous faut un radical changement. Changement dans nos mentalités et dans nos actes.
Notre système éducatif a besoin des filières professionnalisantes et de l’auto emploi. Laissons certaines de nos considérations et parlons patrie. La fonction publique est fermée aux couches défavorisées. Organisons des concours d’entrée à la fonction publique et vous verrez que quatre vingts pour cent des places reviendront aux pauvres. J’en suis sûr. Ceux là vont tirer leurs frères et sœurs et ça avancera.
Moi qui n’aie pas un frère ministre, directeur,…. Ou qui n’aie pas de sous pour soudoyer certains agents de la fonction publique, que ferais-je ? Où irai-je ?
Le président de la république, le pauvre, n’a jamais fréquenté dans une université. Mais de grâce vous qui l’entourez, les pseudos illuminés, le Tchad est avant tout votre pays. Essayer de le conseiller dans le bon sens. La jeunesse est vraiment en danger, elle tend vers la perte. Elle est désœuvrée, sans esprit patriotique.
Je ne saurais terminer mes propos sans saluer le courage et la bonne volonté de ces rares hommes qui ont osé être du coté des jeunes, bien que leur apport n’ait été qu’un coup d’épée dans l’eau. Il s’agit de Dr Idriss Oumar ALFAROUK, ancien ministre de l’Enseignement Supérieur, qui n’a pas eu les mains libres pour éradiquer ce mal. Ainsi que le Pr Mouanodji le Mbaissouroum qui, dès que l’occasion lui est offerte, ne ménage aucun effort pour s’attaquer à cette gangrène. Malheureusement il fut contraint aussi à l’exil pour ses opinions sur le devoir des autorités universitaires d’offrir à la jeunesse une formation de qualité.
Pour la jeunesse tchadienne nous nous battons, pour la jeunesse tchadienne nous mourons. Dieu est notre témoin !!!
DINGAMTOLOUM Tobrome,
Etudiant en 6ème année de Médecine,
exclu de l’Université de N’Djamena et contraint de
quitter sa patrie pour avoir réclamé un peu de considération
et de justice pour la jeunesse Tchadienne !!!!