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29 Décembre 2008
Mais quel
génie, ce général Déby ! On le croyait à terre, complètement fini, le voilà ressuscité et plus vindicatif que jamais. D’un point de vue militaire, en tout cas, il a plutôt bien manœuvré pour
sauver sa peau… et son régime. Tant mieux pour lui, serait-on tenté de dire, sans aucune malice !
Mais alors le peuple tchadien ? Qui donc sauvera ce peuple, si bafoué par les chefs de guerres et de clans qui se disputent le pouvoir à Ndjamena ? Face à la détresse des quelque 10 millions
de Tchadiens, le sort personnel du président Déby importe peu. Il compte d’autant moins, aux yeux des Africains, que sa présence au pouvoir depuis plus de dix-sept ans ne s’est traduite ni par un
mieux-être pour les populations, ni par des progrès notables pour l’Etat de droit et la démocratie. Dans ces conditions, inutile d’espérer des Tchadiens qu’ils célèbrent sa victoire sur les
rebelles. Ils n’applaudiront pas ! Et très peu de gens, en Afrique, auraient versé des larmes sur le sort du général Déby, si son régime avait été renversé. Car cette guerre n’est pas celle du
peuple tchadien, mais une lutte de clans et parfois au sein d’un même clan, pour le contrôle d’une manne pétrolière prioritairement affectée à l’équipement militaire et au confort matériel de
quelques-uns, plutôt qu’au développement du Tchad et au bien-être de ce peuple qui souffre tant, qui souffre trop.
A ceux qui ont volé au secours d’Idriss Déby, on a envie de dire que s’ils veulent garder un minimum de crédibilité aux yeux des Africains, ils feraient mieux de convaincre le miraculé de
Ndjamena de respecter un peu son peuple et de travailler enfin au développement de son pays. Pour justifier son soutien à Idriss Déby, Paris a beaucoup insisté sur sa légitimité et sur la
légalité de son régime. On a même entendu parler de « président régulièrement élu ». Si l’objectif est de persuader l’opinion de la respectabilité de ce régime, alors, la cause
est perdue d’avance. Car aucun des scrutins tenus au Tchad depuis 1990 ne ressemble à une élection régulière.
Evidemment, on entend aussi des voix qui font observer que le choix entre Idriss Déby et les rebelles revient à demander aux Tchadiens de choisir entre la peste et le choléra. On peut les
comprendre. Mais en même temps, en demeurant dans cette métaphore, comment reprocher à des gens qui ont vécu dix-sept ans de peste, l’envie d’essayer un peu le choléra, ne serait-ce que pour
changer de malheur ?
Jean Baptiste Placca