18 Février 2016
La morale des autorités tchadiennes différerait-elle de celle du bas peuple ? Les preuves ne sont plus à établir. Plusieurs jours après les agressions sexuelles répétées sur la personne de Mlle Zouhoura Mahamat Brahim, les femmes tchadiennes ont eu enfin droit à un court texte du Chef de l'état le présentant comme un homme qui serait, lui aussi, scandalisé. Soit.
Scandalisé après qu’une autorité de l’appareil sécuritaire tchadien ait forcé la jeune fille violée à s'exposer à la télévision d’État pour être mieux identifiée, étiquetée et raillée ?
Les agressions sexuelles dont nous avons été, malgré nous, témoins sont commises contre les femmes tchadiennes. Et aussi contre les hommes tchadiens qui portent en eux cette dimension qui, dans une société patriarcale comme celle du Tchad, singularise les vrais hommes : le devoir de protéger l'être femme;
Nous ne sommes pas seulement scandalisés, mais nous nous sentons aussi agresser. C’est pourquoi, nous demandons justice pour Zouhoura et par extension pour les autres tchadiennes violées en silence !
Je voudrais livrer ce message : M. le Président, faites en sorte de ne plus être à la traine dans les symboles forts et les actes concrets qui demandent justice pour Mlle Zouhoura Mahamat Brahim et le jeune Abachou Ousmane, sans oublié les blessés de la répression !
Traduction en texte clair, concrètement :
1. Dégrader, à titre de symbole fort, les généraux dont les fils ont fait montre de leurs déviances et pires instincts (l'enfant prodigue ne ressemble-t-il pas quand même à son père ?);
2. Interpeler l’autorité qui aurait intimidé et forcé la victime à faire des déclarations sous la contrainte aux fins d’entrave à la justice ?
3. Arrêter les responsables de l’unité répressive ayant froidement tiré sur le jeune Abachou Ousmane, décédé des suites de ses blessures; les liens entre les agressions sexuelles, l’assassinat de l’adolescent et la répression policière sont désormais actés; le monde surveille très attentivement ce qu’il se passe sous le ciel tchadien et associe rigoureusement chaque fait de violence à chaque individu qui le commet;
4. Soutenir ce qui reste de la justice tchadienne afin qu’elle condamne le plus rapidement et le plus sévèrement les délinquants sexuels impliqués dans les viols;
5. Envoyer, aux frais de l’État, Mlle Zouhoura Mahamat Brahim dans un pays capable de lui prodiguer les soins de santé et donner de l’aide psychologique pour qu’elle retrouve ses moyens, même partiellement;
6. Instaurer ou renforcer les mécanismes de protection des femmes en impliquant les organisations de la société civile;
7. Promulguer une loi qui renforce la protection des femmes et instaurer des mécanismes efficaces de prévention et de protection, car condamner dissuade certes, mais protéger permet d'éviter des torts souvent irréparables;
8. Soigner convenablement les civils blessés par balles tirés par des hommes de mains au service du pouvoir;
Le Tchad protège une partie de l'Afrique contre les terroristes, mais il ne peut pas protéger les femmes tchadiennes contre les délinquants sexuels en lien avec l’élite du pays, moins encore régler les problèmes sociaux vitaux. Le contraste est violent et exige l’alternance démocratique comme clé des possibles pour matérialiser un changement qui ne peut plus attendre !
Joe Al Kongarena
http://www.facebook.com/joealkongarena/